233. |
Atant s'en est Iseut tornee, |
233. |
Alors Yseut s'est éloignée ; |
236. |
Tristran s'apuie, ce m'est vis ; |
236. |
Sur un banc fait de marbre gris ; |
240. |
Ne foïr m'en a tel poverte ! |
240. |
Comment fuir en tel dénuement ? |
244. |
Petit fait om de lui cherté. |
244. |
De l'homme qui est démuni... |
248. |
Hom nu n'a nul leu de parler. |
248. |
Homme qui n'a rien, il se tait. |
252. |
Qui de ta femme me mescrut : |
252. |
Qui de ta femme et moi dit mal : |
§ Colère du roi Marc |
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256. |
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256. |
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260. |
Et la raison tote entendue. |
260. |
Et il avait tout entendu. |
264. |
Mot het le nain de Tintaguel. |
264. |
Et pour le nain grande est sa haine. |
268. |
Il ne me pout plus ahonter. |
268. |
Ce fut pour me déshonorer ! |
272. |
De ma mollier faire haïr. |
272. |
À la haïr m'a amené. |
276. |
Par feu ferai son cors fenir. |
276. |
Je le ferai tout vif brûler ; |
280. |
Qant o sa feme le trova. |
280. |
Quand avec sa femme le vit. |
284. |
El li mesfist, puis en plora. |
284. |
Puis la punit et en pleura. » |
perron Dans le texte de Béroul, comme dans tous ceux de l'époque, les précisions “topographiques” sont rares ou totalement fantaisistes : elles obéissent plus à des formules toutes faites qu'elles ne sont de véritables “indications scéniques”. Ainsi le “perron de marbre” est-il un élément qui figure aussi bien dans la “Chanson de Roland” que dans les romans de Chrétien de Troyes. Le mot “perron” a pris des sens divers selon les époques, de “rocher” à “banc” et “escalier” ; il renvoie aujourd'hui à un élément d'architecture bourgeoise caractéristique du début du XXe, et c'est pourquoi je préfère ne pas l'employer.
Evrol Abbé attesté au VIe siècle, qui aurait vécu en ermite dans la forêt d'Ouches, dans l'Orne actuelle, la région d'Argentan. Dans les “Vies de Saints”, il est décrit comme celui qui “laissa sa femme”, pour fonder une abbaye, et il passe pour une sorte de symbole de pauvreté et de dénuement. Il existe aussi une “Vie de Saint Evroul”, texte du XIIème siècle. Comme je l'avais écrit dans ma petite étude (Dieu et les Saints dans le Tristan de Béroul, on peut imaginer que Béroul n'a pas placé là son nom par hasard : ses auditeurs connaissaient par cœur leurs “Vies de Saints”... et Tristan, s'il n'a pas “laissé sa femme”, vient précisément d'être quitté par Yseut ! Et il est “totalement démuni”, lui aussi !
Governal D'après les autres textes, il est au service de Tristan, à qui il a appris le métier des armes. Il est complice de ses amours avec Yseut.
le nain Le “nain de Tintagel”, ailleurs nommé “Frocin”. Dans beaucoup de récits et “romans” du moyen âge (comme chez Chrétien de Troyes), le personnage du nain est généralement maléfique. Ici, c'est lui qui va donner à Marc l'idée de divers stratagèmes pour mettre en évidence la liaison de Tristan et Yseut : faire le guet dans le pin s'étant avéré infructueux, il lui suggérera la “fleur de farine” étalée entre les lits... comme on le verra plus loin (vv. 701-705)
escolla “Segoçon” est le nom d'un nain difforme que, selon la légende, l'épouse de l'Empereur Constantin avait pris comme amant pour se venger de son mari !...